Tuesday, October 21, 2008

Le théâtre comique

Le théâtre profane, le plus souvent comique, ne se développe vraiment qu'après la guerre de Cent Ans, à partir de 1450 environ. Ses représentations, plus fréquentes que celles du théâtre religieux, sont assurées par les membres de confréries joyeuses (les Clercs de la Basoche, étudiants en droit, les Enfants sans Souci de Paris, les Cornards de Rouen). Elles ont lieu en plein air, et comprennent en général plusieurs pièces : une sottie, un monologue ou sermon joyeux, une moralité et une farce. Toutes les pièces comiques sont donc par nature assez courtes (300 à 500 vers).

Les farces (du bas latin farsa, qui a donné le verbe farcir : il s'agissait au départ de remplir les interstices des pièces religieuses) sont d'abord de petits intermèdes, qui deviennent de plus en plus longs jusqu'à devenir de véritables pièces, ancêtres des comédies modernes, dans lesquelles il s'agit essentiellement de faire rire. Les farces reprennent les sujets et la tonalité des fabliaux au XIIIe siècle : ce sont des pièces burlesques, d'un comique assez grossier, dans lesquelles l'action est simple et rapide, résultant d'un savant dosage de répétition et de surprise et racontant souvent les infortunes de la vie conjugale (comme dans la Farce du Cuvier). Les personnages y sont récurrents et assez caricaturaux ; un rôle, nouveau par rapport au fabliau, prend de l'importance, celui du badin (le naïf, l'innocent, le candide). Environ 150 farces ont été conservées, écrites entre 1440 et 1560. La plus célèbre et la plus élaborée est la Farce de Maître Pathelin (entre 1456 et 1469) : souvent adaptée, encore représentée aujourd'hui, elle est plus longue que la moyenne (environ 1500 vers). Un argument assez complexe, sur le schéma classique du trompeur trompé, de nombreux jeux de mots plus ou moins subtils et une caractérisation psychologique des personnages assez poussée en font la première des comédies françaises.

Les autres genres comiques sont les sotties, pièces des Sots (par référence à des confréries dans lesquelles les acteurs ont à leur tête un Prince des Sots ou une Mère Sotte, et portent un costume et des attributs de fous), parodies carnavalesques pleines de jeux de mots et de plaisanteries, les moralités, pièces didactiques plus ou moins burlesques, représentant des personnages allégoriques et abordant des sujets religieux, moraux, ou politiques, et les monologues ou sermons joyeux sur le modèle des anciens sermons de jongleurs (comme le Dit de l'herberie de Rutebeuf) dont l'un des plus connus est le Franc Archer de Bagnolet (1468), monologue du soldat fanfaron, attribué parfois à Villon. .

La Farce de Maître Pathelin, chef-d’oeuvre du théâtre comique avant Molière, a traditionnellement été réservée aux élèves de collège.
Grâce à un travail éditorial en tout point remarquable, cette pièce peut être abordée avec bonheur dès la fin du cycle 3.

La Farce de Maître Pathelin (ou La Farce de Maistre Pierre Pathelin, Farce Maître Pierre Pathelin, Farce de Maître Patelin) est une pièce de théâtre (du type farce) composée à la fin du Moyen Âge, vers 1460. La 1re édition imprimée date de 1464. On attribue la paternité de cette oeuvre, souvent considérée par ailleurs comme anonyme, à Guillaume d'Alecis1. Les références au monde de la justice (procès, juge, avocat...) émaillant la pièce, certains avancent qu'elle a pu être écrite par un homme de justice. La pièce constitue le meilleur et l’un des plus anciens chefs-d’œuvre du théâtre comique médiéval et est, en outre, souvent considérée comme la première pièce comique de la littérature française.

La Farce de maître Pathelin est écrite en vers octosyllabiques (elle comporte 1599 vers), en dialecte d’Île-de-France. La popularité de la pièce est attestée par le nombre des éditions qui en furent faites avant la fin du XVe siècle. Plusieurs ont été données à Lyon et à Paris, sans date vers l’an 14802 ; la première est datée de 1485 et a pour titre Maistre Pierre pathelin in-4 goth. sans bois de 44 feuilles non chiffrée de 26 lignes à la pleine page (imprimé à Lyon par Guillaume Le Roy) ; la seconde est datée de 1490, et a pour titre Pathelin le grant et le petit (imprimé à Paris le 20 décembre 1490, in-4 goth. de 34 feuilles de 29 lignes à la page); elle est illustrée3. Plusieurs de celles qui suivent, au XVIe siècle, offrent des remaniements de texte et des variantes de titre ; c’est le Nouveau Pathelin, la Vie et le Testament de Maître Pierre Pathelin, la Comédie des tromperies, finesses et subtilités de Maître Pierre Pathelin, etc. De France, elle s'est répandue à l’étranger et on la trouve imitée, en Allemagne.

Le texte initial composé en vers de huit syllabes a été transposé en français moderne, dans une langue simple, riche et colorée. Seul le lexique accessible ou représentatif de l’époque a été maintenu.

Les subtiles illustrations de Boutet de Monvel complètent, agrémentent et facilitent l’appropriation d’un texte source qui offre le stéréotype du trompeur trompé et des renversements de situation.

Le schéma est aisément mémorisable.

Guillemette, la femme de Pathelin, en donne d’entrée la trame : il faut songer que " le dupeur est souvent dupé ".
Ainsi, le drapier trompe Maître Pathelin sur le prix du drap que l’avocat sans le sou veut acquérir.

Pathelin use de sa maîtrise du beau langage pour tromper le drapier et ne point le payer en feignant une grave maladie d’abord, en se faisant passer pour fou ensuite.

Agnelet, le berger simplet, trompe à son tour le drapier mais aussi l’avocat, en suivant à la lettre ses conseils et en bêlant à l’heure du paiement des honoraires.

Le plus ignorant a raison des experts en éloquence et en négoce.

À partir de cette leçon, le texte invite à des mises en réseaux réjouissantes, d’une farce à l’autre mais aussi de la littérature aux autres arts.

L’auteur (anonyme) organise lui-même ces mises en réseaux, au fil des dialogues.
La toujours clairvoyante Guillemette déclare que cette histoire lui fait penser à la fable Le Corbeau et le Renard ;
A son exemple, on cherchera d’autres mises en réseaux réjouissantes (Le Coq et le Renard de La Fontaine entre autres).

Mise en voix et mise en scène seront appréciées et demandées par les élèves. Elles sont tout à fait à leur portée grâce à la vivacité des dialogues et à la clarté d’un schéma dramaturgique exemplaire.

Satire féroce et jubilatoire, la Farce de Maître Pathelin est une joyeuse école de friponnerie universelle, une suite de ruses et de fraudes faisant ricochet, sans autre morale que le plaisir de voir tromper un trompeur. La pièce refuse toute position morale : les personnages présentés sont de réjouissantes canailles, et maître Pathelin, avocat sans cause, l’est plus encore que tous les autres réunis. Le principal personnage est resté comme un type de fourberie flatteuse et cauteleuse et c’est de cette pièce que l’adjectif patelin a revêtu l’acception péjorative de douceur insinuante et hypocrite. Une foule d’expressions de cette perle littéraire du vieux théâtre - comme « Revenons à nos moutons » - sont devenues proverbiales.

LA FARCE DE MAÎTRE PATHELIN

Résumé

Maître Pathelin, avocat sans le sou, subit les remontrances de sa femme Guillemette. Afin de l'apaiser, il lui promet de se procurer du drap sans avoir à payer. Il se rend chez un marchand et emporte une large pièce de tissu en invitant son fournisseur à se rendre chez lui, où il trouvera à dîner et son argent. Pathelin imagine un stratagème pour berner le marchand peu méfiant, dans lequel lui et sa femme auront à jouer la comédie. Il va se faire passer pour malade afin de semer le trouble dans l'esprit de sa victime. L'arrivée d'un quatrième protagoniste, le berger Thibaut l'Agnelet, crée un imbroglio comique.

les personnage

Maître Pathelin, avocat roublard.

Guillemette, épouse de Maître Pathelin.

Guillaume, marchand de drap.

Thibaut l'Agnelet, berger chargé des brebis de Guillaume.
Le juge